Francine Labelle©
Pour comprendre comment notre œil voit la couleur, Jean Goguen, mon prof de design à Concordia nous avait proposé cette expérience et je vous la propose. C’est l’expérience qui, moi, m’a sidérée et m’a fait devenir peintre. Rien de moins.
- Trouvez une ampoule incandescente de 60 watts max. Attention! Il ne faut surtout pas utiliser une ampoule halogène, ni « led « parce que celles-ci dégagent une lumière trop violente pour les yeux. L’exercice est sécuritaire pour les yeux, mais seulement si vous prenez une ampoule dite incandescente, les bonnes vieilles ampoules, et alors n’ayez crainte. Dans les magasins, actuellement, on ne trouve plus que les 40W pour les réfrigérateurs, mais ça fonctionne.
- Placez-vous dans une pièce qui peut devenir absolument noire si vous éteignez la lumière. Vous disposez votre lumière incandescente et vous vous placez à un mètre de la lumière en question, puis vous éteignez tout, sauf l’ampoule de 40 ou 60 watts incandescente. Vos yeux s’habituent facilement à cette étrangeté.
- Vous regardez directement la lumière pendant 60 secondes bien comptées Vous allez probablement commencer à voir des couleurs apparaître sur l’ampoule : en fait ces couleurs sont dans le fond de votre œil.Après soixante secondes, vous éteignez la lumière et vous regardez ce qui se passe. Le phénomène se poursuit pendant environ quelques minutes et avec l’habitude on peut le poursuivre pendant cinq minutes, si on reste dans le noir et qu’on se concentre vraiment sur le spectacle. Les couleurs pulsent dans un cercle à peu près de la forme de l’ampoule. Ces couleurs vont changer d’une fois à l’autre et d’une personne à l’autre, mais en général vous verrez d’abord le centre jaune avec l’orange-rouge autour et en regardant bien, une teinte froide, bleuâtre et sombre tout autour. Oups ! Ça disparaît, puis une nouvelle couleur apparaît en pulsant, rouge-magenta — un rouge froid- au centre avec des couleurs autour. Puis les couleurs plus froides prennent le dessus, ça pâlit, ça disparaît et puis oups, ça réapparaît, mais en se transformant, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’il n’y ait plus grand-chose…
- Ça vaut la peine d’essayer.
Plus on le fait souvent, plus on voit de couleurs et plus le phénomène dure longtemps.
Cette technique est encore utilisée par certaines personnes pour s’endormir le soir. Elles partent dans la vision des couleurs qui se décomposent devant leurs yeux. Et comme cette expérience transporte en ondes alpha — l’onde dans laquelle on baigne quand on glisse dans le sommeil — cette expérience est agréable. Les Grecs de l’Antiquité, semble-t-il, l’utilisaient pour méditer au moment où le soleil se couche à l’horizon, seul moment où on peut regarder le soleil sans danger.
Cette pulsation de couleurs qui surgissent dans le fond de l’œil, puis disparaissent pour faire apparaître d’autres couleurs, de plus en plus froides, c’est ce qu’on a appelé en anglais « the after-image » et que Jean Goguen avait traduit par la rémanence dans le fond de l’œil ».
On sait maintenant que la couleur n’est pas sur l’objet qu’on regarde. C’est le cerveau qui interprète la longueur d’onde vibratoire reçue par la rétine et qui la « lit » en couleur en fonction des récepteurs dans l’œil…
Comment voit une personne daltonienne ? Énigme…
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